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La modernisation repousse la Russie vers le féodalisme

La modernisation repousse la Russie vers le féodalisme

14.05.2010 — Analytique


Le boom des investissements de la fin des années 90 et de la première moitié des années 2000 a contourné la Russie. Le pays a laissé passer la chance de moderniser son industrie. Les experts considèrent que l'économie russe n'a pas pu attirer les investissements en raison de son très faible niveau technologique. Relever ce niveau ne pourra pas se faire sans réforme politique et l'Etat fédéral devra nécessairement transférer une partie de ses compétences aux régions. Cependant, les avis divergent sur cette question : certains économistes affirment que les russes imitent les institutions inhérentes à une économie de l'innovation, sans même en concevoir une première ébauche. Le correspondant de "RusBusinessNews" a examiné le débat sur le développement des régions russes. 

Selon Natalia Zubarevich, Directeur du programme régional de l'Institut indépendant de la politique sociale, en Russie sont entrain de se développer deux crises qui avaient été précédemment différées. En 2010, l'Etat sera confronté à deux principaux problèmes : le chômage et les relations inter-budgétaires. D'après les données de l'expert, la "poche" de travailleurs en surnombre constitue près de 4 millions de personnes. Aujourd'hui ils sont payés pour arrêt de travail forcé, et on leur dit que demain tout ira bien. Mais la réalité sera bien différente car l'introduction des technologies modernes demandera des réductions de personnel du double, voire du triple. Seule la création de nouvelles entreprises pourrait permettre d'absorber les ouvriers superflus, or celle-ci est rendue extrêmement difficile en raison des barrières administratives et de l'absence d'investisseurs.

En attendant, l'État préfère investir non pas là où il faut, mais là où il considère que c'est nécessaire. Par exemple, au Tatarstan, le niveau de chômage est plus faible que dans la moyenne russe, mais ce sujet de la Fédération de Russie a reçu 3 à 4 fois plus de moyens pour les travaux publics que d'autres régions qui en ont plus besoin. Pour des questions d'opportunité politique on finance la Tchétchénie, l'Ingouchie ou encore Sotchi où auront lieu les Jeux Olympiques de 2014. D'autres régions se sont retrouvées sous la dépendance d'une "gestion manuelle", qui consiste en déplacements du Premier Ministre Vladimir Poutine de ville en ville, celui-ci définissant personnellement, à quelle région donner de l'argent, et quelle région se débrouillera comme elle pourra. 

Cette gestion manuelle des problèmes a pour conséquence une augmentation de 17 à 27 % des transferts du budget fédéral aux régions. Comment remplir le budget de la Russie en 2011? Pour l'instant la question est en suspens. Les régions de travailleurs, tels que les sujets du district fédéral de l'Oural, ont été dépouillés "jusqu'à la moelle" selon l'expression imagée de N. Zubarevich. Ils sont tombés dans le trou de la crise avant tout le monde, alors que le centre était préoccupé par le sauvetage des deux tiers restant des régions où la crise ne faisait que commencer. Les régions de "culture sous serre" de la Fédération, quant à elles, vont rester dans un état permanent de terreur en 2010 : d'un côté, il leur faudra diminuer les dépenses, ce qui est interdit, de l'autre, il faudra augmenter les tarifs des services publics et communaux, ce qui est impossible en raison de la protestation des citoyens. Enfin, une réduction du réseau des institutions sociales sera nécessaire, ce qui aura pour conséquence négative de libérer de leur emploi une grande partie des employés de l'État dont la réinsertion dans l'économie sera très difficile.

L'État et le monde des affaires n'ont pas été d'un grand soutien. Ayant analysé les mesures anticrise prises par le pouvoir en place, Youri Simatchev, vice-Directeur du Centre Interdépartemental d'Analyse souligne que le soutien de l'État n'a pas permis d'exclure du marché des entreprises inefficaces ni de les remplacer par des compagnies novatrices. D'après les données de l'expert, les entreprises en pleine expansion et actives sur le plan de l'investissement ont apprécié de manière positive la réduction des charges fiscales et la restriction des contrôles étatiques, mais également la stimulation du financement par crédit et la rénovation de l'équipement, ainsi que la réduction du prix de la connexion aux réseaux électriques. En même temps, l'établissement de quotas sur la livraison de la production dans le cadre des commandes municipales, ainsi que l'octroi de tarifs préférentiels du côté des pouvoirs publics ont permis aux compagnies passives et financièrement instables de se maintenir sur le marché. En conséquence, la crise n'a eu aucun effet d' "écrémage" sur l'économie russe : les compagnies inefficaces sont restées sur le marché, mais les entreprises porteuses n'ont pas reçu d'impulsion pour se développer. Le soutien de l'État a conduit à une stabilisation de l'industrie sans modernisation.

D'après Y. Simatchev, les fonctionnaires fédéraux, connaissent bien les conclusions de l'étude du Centre Interdépartemental d'Analyse, mais ils sont bien moins intéressés par la formation d'un environnement novateur que par l'organisation du développement d'une activité commerciale concrète où ils savent exactement à qui ils ont affaire, quel sera le coût des décisions entreprises, etc. 

Les experts sont persuadés que tôt ou tard le pouvoir sera obligé de créer des conditions concurrentielles égales tant pour les entreprises, que pour les régions. Cela suppose une délégation de compétences vers le bas, mais également des ressources et des responsabilités, ce qui amènera au changement du système politique russe formé au milieu des années 2000. Néanmoins, comme le remarque Léonid Grigoriev, Président du fonds de l'"Institut des énergies et des finances", un tel scenario ne se produira que si les élites acceptent de se tourner vers une économie moderne basée sur l'innovation, et arrêtent de continuellement chercher à transformer ou à reconvertir ce qui a été précédemment construit par leurs aînés.

Sergueï Kadochnikov, Doyen de la faculté d'Economie de l'Université d'État de l'Oural, souligne cependant l'extraordinaire pauvreté des régions russes. Dans une région comme celle de Tioumen, l'une des plus riches du pays, le produit régional brut est de 32000 dollars par habitant, là où dans la division économique de l'Ile de France, il est de 736000 dollars par habitant. Selon l'expert, les régions arriérées ne peuvent pas mettre en œuvre les technologies étrangères. 

Mikhaïl Maksimov, Premier Vice-Président du Gouvernement de la région de Sverdlovsk considère également que la Russie n'est pas prête à construire une économie basée sur l'innovation. Selon lui, il faut certes réfléchir à l'introduction de technologies modernes, mais il est d'abord nécessaire de trouver des solutions aux choses les plus simples. Les russes aiment se prendre de passion pour le processus même du changement, sans pour autant s'occuper des modalités de mise en œuvre de la mission assignée. Par exemple, actuellement les Ouraliens étudient sérieusement la possibilité de création d'une ligne de chemin de fer à grande vitesse de 200 kilomètres entre Ekaterinbourg et Tchéliabinsk, alors même qu'il serait bien moins cher et beaucoup plus simple de construire une autoroute moderne. La maîtrise des technologies de construction de routes de bonne qualité est aujourd'hui bien plus actuelle que la création d'un train à grande vitesse "Sapsan".

Le Directeur du Centre de recherche macro-économique de la Banque Etatique russe Sberbank Ksenia Yudaïeva considère également que la mentalité russe constitue l'une des raisons à l'échec de la réforme du pays. Selon ses observations, les russes, s'étant tout juste mis à courir un marathon commencent déjà, une fois les cent premiers mètres effectués, à chercher la ligne d'arrivée. Lorsqu'ils comprennent que le marathon n'est pas terminé, les coureurs sont déçus, s'arrêtent, et commencent à réfléchir à la façon dont il pourrait arriver le plus vite possible à l'arrivée.

Selon les experts, la substitution du travail d'ébauche de la réforme en cours à la recherche de la pierre philosophale, est capable d'avoir un effet boomerang sur le développement de la Russie. D'après Natalia Ivanova, membre-correspondant de l'Académie des Sciences de Russie, dans les conditions du capitalisme chaque pays est capable d'être compétitif s'il perfectionne de façon constante ses institutions et ses technologies. Un tel travail demande d'efforts immenses intellectuels et semble fatiguant à de nombreuses personnes, raison pour laquelle certains pays et certaines régions reculent inévitablement vers le féodalisme. La Russie, comme on le sait, a toujours été un maillon faible dans la chaîne du capitalisme.

Vladimir Terletsky

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